L'édito
Jusqu’au cou... et comment s’en sortir*
L’explorateur polaire Paul-Emile Victor s’était fendu d’un opuscule ainsi baptisé, en 1979.
Lui évoquait la situation de la planète, avec beaucoup de clairvoyance. Son titre, sans point d’interrogation, laissait ouverte la piste des solutions. Le nom de cet ouvrage frappe aujourd’hui quant à son acuité... au regard de l’état du bateau France. Ce magazine n’est pas le lieu du débat politicien. Mais on voit combien la politis, au sens des affaires de la cité, entraîne des conséquences économiques majeures. Les décisions improbables du parlement européen sur l’interdiction radicale du moteur thermique dans un calendrier impossible s’avèrent dévastatrices pour notre industrie automobile. L’inflation normative de l’Europe et les surréglementations françaises génèrent des surcoûts invraisemblables qui transforment toujours plus les modèles économiques en quadrature du cercle. Les acteurs du monde du bâtiment peuvent savamment en parler. La frénésie dépensière de gouvernements successifs au mieux désinvoltes, au pire irresponsables, a placé le pays dans une funeste spirale.
Ecuries d'Augias
Jusqu’au cou, avec plus de 3 340 milliards de dettes, avec un minimum de 340 milliards d’émissions d’emprunts d’Etat annoncées en 2025, nous y sommes sans l’ombre d’un doute. Comment en sortir, l’honnêteté nous invite sinon au pessimisme, du moins à la plus grande perplexité. Car les blocages se multiplient à tous les étages, politique, institutionnel, économique, au moment même où le système français emphysémateux nécessiterait un nettoyage en profondeur, telles les écuries d’Augias. Le 5e des 12 travaux d’Hercule consista à évacuer 30 ans de fumier accumulé dans ce royaume pourtant béni des dieux et d’une immense opulence. Il en couvrait même toutes les prairies et en empêchait le labour. Dans la mythologie grecque, Hercule dévia le cours de deux fleuves pour y parvenir en un jour. Une décennie suffira peut-être à la France. A condition de commencer sans attendre une minute et sans avoir la main qui tremble face à une urgence dont, seule bonne nouvelle, on semble enfin prendre conscience.
*Jusqu’au cou... et comment s’en sortir, Paul-Emile Victor, 1979, édition Fernand Nathan.